La rue qui nous sépare de Célia Samba

 

Je ne connaissais pas du tout cette autrice mais l'avis d'Audrey du Souffle des mots (youtube) m'avait vraiment envie de découvrir cette histoire. J'étais curieuse de voir comment Célia Samba avait réussi à aborder le sujet des personnes qui dorment dans la rue - une vision romancée ou réaliste ? J'avais aussi envie de confronter mon comportement et la façon dont il était perçu par les différents sans domicile fixe que je peux croiser dans ma vie quotidienne. Quoi qu'il en soit, ce livre ne m'a pas laissé indifférente.

➤  Un sujet délicat

Le sujet principal de ce roman touche les sans abris. C'est la première fois que je lis un roman qui s'intéresse à ce sujet ... ce n'est sûrement pas le seul mais je trouve ça dommage que ce soit si peu abordé en littérature alors que c'est un vrai fléau.
Quoi qu'il en soit, j'ai apprécié l'approche de l'autrice qui, malgré une histoire romancée, a su décrire un quotidien difficile pour Tristan : la peur, les doutes, l'engrenage vicieux, la lassitude, la colère, les vols ... Surtout elle a donné un contexte à la descente aux enfers qui l'a amené dans la rue. Ça a été mal perçu par certains lecteurs qui ont trouvé l'histoire de Tristan (et celle de Mia aussi d'ailleurs) trop cliché, too much. Personnellement je pense qu'on n'arrive pas dans la rue avec un passé tout beau et rose et je trouve que l'histoire décrite pourrait être totalement vraie. D'ailleurs, Célia Samba indique à la fin du livre qu'elle a essayé "d'enquêter" sur le quotidien et le passé de sans abris pour s'approcher le plus possible de la réalité dans son roman, ce qui est pour moi un grand plus.

➤  Un roman genré Jeunesse ... !

J'ai un gros problème avec ce genre que je ne trouve jamais assez défini ...

Même si je pense que le but est de s'adresser aux jeunes pour changer leurs regards et leurs comportements envers les sans abris, je ne recommanderais pas ce roman à de trop jeunes enfants. D'abord parce que je trouve que le langage, les expressions et certains aspects sont adultes. Ensuite parce que dans ce livre il y a de la violence et on parle aussi de viols, de maltraitance et de traumatismes. Pour moi ce n'est pas du tout adapté à des moins de 10 ans par exemple. J'aurais plus conseillé ça a des ados, donc la mention "young adult" aurait été préférable pour moi.
Je pense d'ailleurs que j'ai beaucoup apprécié les personnages parce qu'en tant qu'adulte j'avais le recul nécessaire pour comprendre les subtilités des caractères et comportements de chacun.

➤  Deux fins proposées ...!

On en arrive au HIC de ce roman à mes yeux. J'en avais parlé sur Instagram (milleca_du_boudoir), je trouvais ce roman addictif jusqu'à ce que j'arrive à environ 260 pages et que je tombe sur une note de l'autrice qui nous laisse le choix. Soit je pouvais continuer ma lecture et découvrir une fin bouleversante, soit je pouvais me rendre telle page et découvrir une fin un peu mieux ...
Ça, c'était une première aussi et ça ne m'a pas plu. De plus, la "mauvaise fin" est écrite en 4 pages alors que l'autre fait 100 pages ... Car oui, j'ai lu les deux ! Comment faire autrement ? Autant je suis parfois un peu déçue des fins trop ouvertes qu'on retrouve souvent dans les one-shot, mais le fait que l'autrice nous délivre une histoire si addictive et qu'elle ne prenne pas de responsabilité pour la fin, ça m'a beaucoup frustré. En plus j'ai eu l'impression d'avoir une fin jugée réaliste et une autre plus édulcorée pour ceux qui croient aux miracles ... bref ça m'a clairement laissé un goût amer.

Vous l'aurez compris, je vous conseille cette lecture que j'ai trouvé prenante et qui s'attaque à un sujet sensible. D'ailleurs l'investissement de l'autrice pour délivrer une vision au plus proche du réel m'a beaucoup touché. Je n'ai pas du tout adhéré à la proposition des deux fins mais c'est un goût tout à fait personnel. D'autres lecteurs apprécieront certainement l'originalité de la démarche.

8/10